En deçà de l'idéal, quel qu'il soit, avant qu'il ne trouve chez chacun d'entre nous sa forme et son expression, il y a l'angoisse d'exister en vain, le dégoût des idées reçues, l'inquiétude de ne pouvoir maîtriser son destin, la peur de mourir, la colère, la révolte... C'est ce cri que fait entendre Paul Nizan, jeune normalien et bientôt écrivain, militant du Parti communiste français, quand il rédige en 1931 Aden Arabie. Il faut l'entendre, et entendre aussi l'hommage clairvoyant que lui rend trente ans après son ami, son copain de chambre à la Grande École, Jean-Paul Sartre, en rédigeant la préface qui accompagne la réédition du texte en 1960 chez François Maspero. Il faut entendre ces deux voix porteuses d'idées et d'idéal se faire écho et coudre ensemble des mots qui ont un sens, souffler à leur époque et à la nôtre encore, dans l'air raréfié des conformismes les plus médiocres, fussent-ils travestis en idées soi-disant nouvelles, le vent essentiel de l'intelligence, de l'ardeur et du combat. « J'avais 20 ans. Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie. » Beaucoup d'entre nous, déjà vieux, connaissent cette phrase, ils l'ont ou auraient pu la prononcer, beaucoup de jeunes gens pourraient la dire sans savoir qu'elle fut écrite jadis par un grand frère disparu ; elle résonne comme l'expression d'une inquiétude commune à toutes celles et ceux qui viennent au monde et veulent y trouver leur juste place.
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